Non, il ne l’entend pas, il ne la voit pas, mais il sent sa présence. Elle est là, tout près, et elle l’appelle …

Elle est derrière cet écran parfumé de glycines et de bougainvillées, qui grimpent lentement le long des vieux murs de pierre de sa terrasse, et qui s’enroulent amoureusement autour des grilles de fer forgé d’une ancienne tonnelle. Une horde de moineaux turbulents et audacieux s’y faufilent aussi, entre les fleurs aux teintes mauve et pourpre, et s’égosillent à qui mieux mieux sous les rayons du soleil.

Non, il ne l’entend pas, mais elle est là.

En contrebas de sa terrasse, dans la ruelle ombragée, des gosses jouent, rient, crient. La meute est agitée, et leurs pas, leurs courses, claquent et retentissent sur le pavé. Un peu plus loin, le marché s’anime. Vendeurs et camelots hèlent le client autour des étals encombrés. C’est le brouhaha habituel, le joyeux concert des boutades et des exclamations les plus pittoresques. Chacun vante sa cargaison, ses breloques, ou son maquereau très très très frais qui vient tout juste d’être sorti de l’eau.

Non, il ne l’entend pas, mais elle l’appelle.

Non, il ne la voit pas, mais il sait tout d’elle. Elle a revêtu sa robe bleue, même si, par une magie sans cesse renouvelée, elle adopte chaque jour un visage nouveau, sous ses dentelles d’écume blanche qui courent jusqu’à l’horizon, là-bas, où se meurent les nuages. Courez courez, jolis moutons blancs, mon pinceau vous capturera bientôt et vous mettra en cage.

Non, il ne l’entend pas, mais elle l’appelle … La mer …