La matinée commençait à peine, la journée s'annonçait plutôt ensoleillée, pas un nuage ne venait tâcher le ciel bleu de leur blanche présence et une douce brise faisait voler les minces rideaux de la chambre où Morwan terminait sa nuit. Alors qu'il dormait encore du sommeil du juste, une petite boule de poils noire lui sauta dessus pour atterrir sur ses parties sensibles. Morwan se redressa d'un bloc en lâchant un juron bien senti, les larmes aux yeux il tourna un visage convulsé de douleur vers la cause de ce réveil plutôt désagréable, qui attendait au pied du lit. Ashéara faisait déjà la taille d'un gros chat adulte et mangeait beaucoup... enfin buvait beaucoup plutôt. Le jeune Naakti n'aurai bientôt plus de graisse à faire fondre pour la diluer dans le lait de sa petite panthère, il allait bientôt être obliger de chasser juste pour trouver cette fameuse graisse. Il soupira en se demandant à partir de quel âge les panthères commençaient à manger de la viande, puis il sortit de son lit et alla à son point d'eau pour ses ablutions matinales, pour enfin se vêtir de sa toge noire. Ashéara miaulait à ses pieds, attendant avec une impatience flagrante l'heure du petit déjeuner. L'avant veille, Morwan avait été chercher un collier qu'il avait fait pour sa petite protégée, un épais collier en cuir qui devait être à même de résister aux griffes du la jeune panthère, et de fait, l'animal s'était lassé de tenter de couper l'objet qui lui entourait le cou. Ainsi, son propriétaire pourrait mieux la maîtriser.

Après la collation matinale, Morwan décida d'aller se promener, exceptionnellement, il n'y avait pas conseil ce matin. Il attacha au collier d'Ashéara une lanière en cuir, un reste d'une tentative du jeune homme de se fabriquer un fouet, se saisit de son arc, son carquois et son bâton puis sorti de chez lui. Ashéara était apparemment ravie de sortir et se mis à gambader et sauter sur tout ce qui bougeait et était à proximité immédiate de ses petites pattes griffues. Chemin faisant, ils arrivèrent au parc d'entraînement. Morwan s'arrêta et, en regardant ses camarades s'entraîner, il senti une envie brûlante d'aller se battre lui aussi. Avisant un novice qui regardait ses ainés s'entraîner, il attacha Ashéara non loin de lui et chargea le jeune homme de la surveiller, il laissa aussi son arc et ses flèches, menaçant le jeune novice qu'il ne resterait pas grand chose de lui s'il partait avec Ashéara ou s'il manquait ne serait-ce qu'une pointe de flèche. Défaisant le haut de sa toge, il arriva auprès de ses camarades qui le saluèrent joyeusement.

"Hé Morwan !! C'est plutôt rare de te voir des nôtres...
- Il n'y a que les imbéciles qui ne changent pas d'avis, Sohta ! Et m'occuper d'Ashéara me fait m'encroûter un peu, je le crains..."

Une grande claque dans le dos suivit la déclaration du jeune Naakti. La main massive qui venait de martyriser les arrières du jeune guerrier venaient d'un des meilleurs guerriers du peuple Naakti, un des compagnons d'entraînement favoris du jeune Morwan, car cet homme était un de ceux contre qui il n'avait jamais gagné un seul combat.

"Il est vrai que tu traîne souvent dans la salle du conseil ces derniers temps... je suis sûr que je pourrais te battre en moins d'une minute !!
- Je te prends au mot, Simara !"

Avec un sourire carnassier, Simara se plaça en garde face au jeune homme. Morwan n'avait jamais gagné un seul match contre lui, et n'espérait pas remporter celui-ci, mais un entraînement n'était pas un entraînement s'il n'y avait pas un minimum de challenge. D'âge mûr, Simara avait pour lui une imposant musculature et une grande expérience du combat, Morwan avait pour lui sa rapidité, son allonge et une bonne résistance, mais cela ne l'avait pas aidé à remporter les match précédents. Les autres guerriers s'écartèrent des deux combattants, à l'exception de Sohta, lui aussi en tenue de combat. Un haussement de sourcils marqua l'interrogation de Morwan. Simara s'expliqua.

"Sohta et moi attendions ta venue ce matin pour tenter une nouvelle forme d'entraînement, du deux contre un. Bien évidemment, vous serez ensemble contre moi, puisque de nous tous, je suis le plus expérimenté... toujours partant ?"

Morwan acquiesça. Après tout, se battre avec un camarade contre un adversaire supérieur en expérience et technique pouvait s'avérer tout aussi intéressant, et ce pour les deux parties. Avant de se concentrer totalement sur le combat, il jeta un rapide regard vers ses affaires et sa panthère. Ashéara dormait au soleil et le novice la caressait machinalement, ne perdant pas une miette de ce qu'il se passait sur le terrain. Satisfait, le guerrier reporta toute son attention sur son adversaire du moment.

Les trois hommes se regardèrent ainsi pendant une quinzaine de secondes. Morwan attaqua alors. Il fusa vers Simara, une attaque de taille sur la droite fut aisément parée par le vétéran, qui du en parer une autre venant de la gauche, attaque portée par Sohta. Morwan se retourna et attaqua d'estoc, attaque déviée en même temps que Simara parait une attaque de taille de Sohta. La joute continua, les trois adversaires faisaient virevolter leurs bâtons et enchaînaient les attaques et les parades, Morwan était impressionné par l'habileté de Simara, le vétéran ne semblait pas le moins du monde dérangé par ces attaque venant de tout côtés, au contraire, il semblait y prendre un plaisir grandissant. Sohta lui essayait de suivre au mieux les attaques de Morwan, mais ne semblait pas trouver sa place dans ce combat, plusieurs fois les bâtons des deux "alliés" se heurtèrent, tirant un rire moqueur de la part de Simara qui en profitait toujours pour attaquer. Morwan reçu plusieurs coups, dont un qui lui ouvrit la lèvre et l'autre lui ouvrit l'arcade sourcilière. Il ne s'en rendit compte que quand le sang commença à goûter dans son œil, afin de diminuer cette gène, il ferma l’œil incriminé, perdant ainsi une partie de son acuité visuelle. Sohta reçu une attaque de taille dans l'estomac, le laissant momentanément hors de combat, Morwan dû donc se battre de son mieux contre un adversaire qui prenait un pied manifeste. Le jeune guerrier évita autant qu'il le pouvait les attaques de son ainé, restant sur la défensive, il ne trouvait pas, dans la posture de son vis-à-vis la faille qui lui permettrait de contre attaquer. Refusant de rester cloitré à la défensive, il tenta une contre attaque maladroite qui n'eût pour conséquence que de lui faire perdre son bâton. Par réflexe il porta la main à l'endroit où se trouvait habituellement sa dague en silex, sa main ne se referma que sur le vide. Il évita une autre attaque de Simara et plongea vers son bâton. Celui de son aîné s'interposa, lui signifiant une nouvelle défaite.

Morwan se retourna vers le visage souriant du vétéran qui l'aida à se relever.

"Intéressant combat n'est-ce pas ?
-Tu es vraiment trop fort, Simara... même seul contre deux tu gagne encore..."

Simara parti d'un rire homérique et passa un bras fraternel autour des épaules du guerrier qui tentait de juguler le mince filet de sang qui coulait sur son œil droit.

Vous faites trop de gestes inutiles vous les jeunes, avec l'expérience on apprend à lire dans ces mouvements les projets d'attaque de nos adversaires.

Morwan eut une grimace un peu déçue, il pensait pourtant suffisamment maîtriser son corps pour supprimer ces mouvements inutiles. En même temps, que pouvait espérer un guerrier depuis un an, aussi doué soit-il, face à un vétéran qui l'était depuis avant sa naissance ?

"T'inquiète pas, camarade, tu en as moins que bien d'autre de tes ainés. Ceci dit, tu as encore énormément de travail avant de parvenir à complètement les occulter. Bon nombre de nos camarades s'imaginent que le sommet est atteint avec le statut de guerrier, ceux là ne ferons pas long feu. Le statut de guerrier ne peut être maintenu qu'avec un perpétuel entraînement. Mon maître me disait souvent "si tu tombe six fois, six fois tu te relèveras, si tu ne peux utiliser tes mains, utilise tes pieds" et souviens toi de celle ci "la perfection n'existe pas dans notre vie, le jour où tu croiras l'avoir atteinte, ce jour là tu auras perdu."

Morwan ne s'intéressa pas vraiment à la dernière, mais plutôt à la deuxième partie de la première. Il n'y avait jamais pensé avant, mais de fait, les Naakti dépendaient tous un peu trop de leurs armes, et lui le premier. Bâtons, arcs, javelots et dagues, mais le corps aussi pouvait-être une arme, si on savait comment l'utiliser. Perdu dans ses pensées il revint auprès d'Ashéara, se demandant comment il pourrait apprendre à se battre sans armes. S'il avait su comment, il n'aurait pas tourné le dos face à Simara et n'aurait peut être pas perdu aussi vite...