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L'affrontement [PV]

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Edward Longway

Edward Longway

Matelot
Premier personnage


Journal de bord
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MessageSujet: L'affrontement [PV] L'affrontement [PV] Icon_minitimeMer 9 Nov - 18:29


Je gardais un long temps de silence devant le Capitaine Taylor tentant de donner à mon visage un air impassible et impénétrable. Mais, la vérité était que je ressemblais à un homme en loques. Lorsque les deux fusiliers marins étaient venus m'appréhender dans le faux-pont, alors que je rallumais ma bougie, je n'avais pas même eu le temps de prendre ma perruque. Le capitaine me demandait urgemment m'avait-on dit. J'avais craint le pire, non sans raison. Et dans un tel état, je n'était rien. Col de chemise ouvert, gilet déboutonné, avec cette touffe de cheveux survivant sur mon crâne et une mine qui devait laisser penser que je venais de me réveiller après une nuit passée à boire du rhum.

J'avais honte. Honte comme jamais. L'échec m'indisposait. Je me rappelais cette déclaration un jour de mon précédent supérieur, le défunt Capitaine Hemmington lors d'une revue - "Monsieur Longway est un perfectionniste qui ne supporte pas l'erreur. Aussi est-il heureux qu'il n'en commette que rarement car mieux vaut éviter de se frotter à lui à ce moment-là" - Bien entendu, il parlait de cette colère qui parfois me saisissait et la dernière du type remontait… Au jour où j'avais rejoint l'Equinoxe, ce jour pluvieux où une vieille main bienveillante s'était posée sur mon épaule.

Alors je me rappelais de ces mots de mon oncle, ces conseils… Il ne servait à rien de ruminer ses erreurs. Rien. Il fallait aller de l'avant. Mais comment ? Le capitaine m'offrait une opportunité… En échange d'une humiliation publique. Une réprimande comme celle d'un enfant, le genre de chose que je détestais et que pourtant je méritais. Après tout, à sa place j'en aurais peut être fait de même, peut être me serais-je montré plus sévère encore. Mais bon sang qu'est ce qui m'avait pris ! Etais-je incapable au point de me laisser ainsi emporter par mes sentiments contradictoires ?

Ma main s'abattit alors sur la table de bureau d'un coup sec. Je sentis comme frémir le capitaine. Je me laissais aller… Non, je ne devais pas. Alors, comme pour réparer mon geste, je fis mine d'avoir pris une décision. Je repoussai en arrière les rares mèches qui ornaient mon crâne, je redressai mon col de chemise et boutonnai mon gilet ouvert.

- Article 23 du Code Maritime, alinéa deux, "L'officier de quart ne devra en aucun cas abandonner son poste"… Voyez, Capitaine, jusqu'où je pousse le vice… Je… J'ai… Je me suis comporté comme un imbécile… Un bougre d'imbécile… Je n'ai pas réfléchi… J'aurais pu mettre tout l'équipage en danger à causse d'une affaire qui ne regarde que moi… S'il avait vu ça…

Je marquai de nouveau un long silence. On entendait le murmure de la mer et le chant de l'onde. La mélodie du vent qui berçait le navire. L'océan, dangereux, mais fascinant. Certains sont nés de la poussière parait-il. D'autres de l'écume semblerait-il. Et puis, il y a avait ceux qui avaient baigné dans le sang et qui en avaient souillé les flots au nom de leur égoïsme personnel. Pirates, brigands, inconscients aussi. Je ne pouvais laisser le souvenir d'appartenir à cette dernière catégorie. Fautif, mais pas encore coupable. Je comprenais ce que voulait dire aller de l'avant. Errare humanum est, perseverare diabolicum. Il fallait maintenant, non pas oublier, mais se laver de sa faute, garder le souvenir des conséquences qu'elle aurait pu avoir, pour désormais chercher à les éviter.

Evidemment, j'allais devoir attendre pour rendre hommage à la sépulture de l'Amiral Longway, mais n'étais-je pas un homme né de l'écume, un de ceux qui sur la terre ressentent cette sensation de peur de la noyade, d'immobilité, de trop grande fermeté, dureté, constance, paralysie. Le domaine vacillant et voguant, ce miroir fluctuant, jamais stable, toujours en mouvement, cette expression des sentiments de l'esprit, contradictoires mais ô combien fascinant, cette inconstance qui vous entraine de l'état le plus pittoresque à celui d'une grandeur magnificence en quelques minutes à peine. L'homme est un de ces habitants du domaine de la mer, jamais il ne la dompte, c'est elle à son image qui le satisfait ou non.

- Capitaine… Je vous ai trahi aujourd'hui, vous et tout l'équipage. Malgré tout, vous continuez à me faire confiance… Capitaine, je ne vous décevrai pas une seconde fois... Vous pouvez compter sur moi, ce navire ira là où vous le désirerez.
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Butchlet

Butchlet

Matelot
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MessageSujet: Re: L'affrontement [PV] L'affrontement [PV] Icon_minitimeDim 20 Nov - 22:42

Butchlet ne put s'empêcher de ressentir un grand soulagement lorsque le regard d'Edward se durçit pour lui annoncer qu'il restait au service, décidé et motivé. Il se doutait que l'épreuve ne serait pas simple pour le lieutenant de l'Equinoxe qui venait de perdre un proche. La frégate passa dans un creux qui annonça que le vent du large reprenait ses droits au sein de la voilure du bâtiment militaire. Le commandant se leva en attrapant son manteau de mer.

- Allons, venez. Allons jouer notre comédie pour nous remettre au boulot en paix.

Il frappa Edward sur l'épaule et se dirigea vers la porte. Le fusillier de garde se raidissait tandis que Francis approchait, l'air curieux. Butchlet l'ignora et se dirigea vers la claire-voie. Une fois sur le pont, il put constater à quel point l'Equinoxe filait tranquillement. Les gueules noires des canons alignés brillaient au soleil tandis que les marins de quart s'affairaient dans les hauts alors que ceux qui étaient au repos profitaient de l'ombre des voiles ou s'accoudaient au bastingage où ils ne gênaient personne. La mer était vide, pourtant ce n'était qu'une impression qui ne durerait pas. Dieu seul savait à quel point l'horizon pouvait paraître étroit lorsqu'un bâtiment hostile se pointait face à vous et à quel point l'horizon rapetissait au fur et à mesure qu'approchait l'ennemi.

Butchlet monta sur la dunette et salua les officiers présents dont Grum, maître pilote, Janome, troisième lieutenant et Allamy, enseigne. Ce dernier semblait s'acclimater à la frégate qui différait pourtant de beaucoup du lourd galion l'Archange sur lequel il avait servi avant qu'il ne soit coulé bas et que l'Equinoxe passe par là pour sauver les rescapés du massacre. Le commandant de la frégate s'installa au bord au vent et laissa son regard errer sur l'horizon avant d'humer l'air iodé de la mer Zannir pour finalement se retourner vers ses hommes.

- Monsieur Longway, que vous avez face à vous, s'est rendu coupable de ce qui est considéré comme une faute grave dans toutes les Marines du monde. A savoir, quitter son poste en service sans autorisation préalable et sans en aviser le supérieur hiérarchique direct, à savoir moi.

Butchlet parlait suffisamment fort pour que tout le navire l'entende. Les marins devaient comprendre que la justice à bord était la même pour tous, officiers comme matelots.

- Je pense que mes remontrances suffiront...

- … Ohé en bas ! Voile sur tribord avant !

Tous les regards de la dunette se portèrent vers la vigie qui se trouvait quelque part dans les hauts. Chacun attendait, Butchlet le premier, des informations supplémentaires de la part de la vigie.

- Deux bâtiments ! Un petit gréement et un autre plus massif !

Ces couples étaient souvent synonymes de pirates s'en prenant à des navires marchands. L'Equinoxe était dans ces eaux pour empêcher ce genre d'agissement.

- Il y a un brick monsieur ! L'autre semble être une corvette !

Butchlet pesta intérieurement. Une corvette... L'Equinoxe était une petite frégate et pouvait avoir du mal à rivaliser face à une corvette lourdement armée et bien menée. Si les deux navires étaient hostiles, l'histoire pouvait bien se corser.

- Ils voguent de conserve ! Route plein sud !

Spoiler:

Le commandant leva les yeux jusqu'à la flamme en tête de mât qui indiquait la direction du vent. Sud-est. L'Equinoxe se dirigeait vers les eaux dangereuses plein est.

- Monsieur Grumb, cap au sud-est je vous prie. Serrez le vent.

- A vos ordres monsieur, en route au sud-est.

La roue tourna en grinçant tandis que les trilles des sifflets rameutaient tous les marins disponibles pour maîtriser la voile qui gémissait à l'idée de serrer autant le vent. Les deux inconnus étaient passés sur bâbord avant et l'Equinoxe taillait sa nouvelle route. Butchlet se tourna vers Longway.

- Monsieur Longway, avons-nous des corvettes dans cette zone ?

- Cela me paraît fort improbable, commandant. Aucune corvette de la Marine Royale n'est actuellement détachée en mer Zannir.

- Je vois. Les missives reçues toute à l'heure faisaient état de plusieurs nom de navires pirates dont un de type shooner ou brick : l'Aiglon Furieux. Monsieur Allamy, prenez une lunette et montez avec la vigie. Trouvez-moi le nom de ces navires au plus vite. Monsieur Longway, toutes voiles dehors je vous prie.

L'enseigne montait dans les filets tandis que les gabiers déployait toute la toile possible au point d'en faire grincer les mâts qui se courbaient légèrement sous la poussée du vent. Il passa une demi-heure où les officiers spéculaient sur ce au devant de quoi ils allaient avant qu'un mouvement dans les enfléchures ne mette fin aux discussions.

- C'est bien l'Aiglon Furieux, commandant. Il escorte une grosse corvette d'une trentaine de pièces, peut-être plus : l'Empreinte du Sang.

Spoiler:

- Bien, nous voilà fixés. Monsieur Longway, branle-bas de combat.

Butchlet attrapa une longue-vue et commença à scruter l'horizon. Un sentiment d'impatience mêlé à une appréhension lui prenait aux tripes. Le sentiment qu'il ressentait avec le combat.


Dernière édition par Butchlet le Lun 19 Déc - 14:50, édité 1 fois
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Edward Longway

Edward Longway

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MessageSujet: Re: L'affrontement [PV] L'affrontement [PV] Icon_minitimeJeu 1 Déc - 22:46

- Bien, nous voilà fixés. Monsieur Longway, branle-bas de combat.

Et voilà, c'était parti. Premier baptême du feu à bord de l'Equinoxe. J'oubliai alors tout. Qu'importait désormais que je porte ou non une perruque sur la tête ou que je sois vêtu d'une veste à galons. L'affrontement allait avoir lieu. Dans un tel cas de supériorité numérique, deux solutions s'imposaient : fuir ou les affronter un à un. La première étant évidemment inacceptable pour tout bons soldats que nous étions, la seconde avait donc constitué le choix du capitaine.

Au vu de la situation, il serait plus aisé de s'attaquer d'abord au brick. Plus faiblement armé, il n'opposerait pas une farouche résistance malgré sa rapidité face à une frégate à la conception audacieuse comme l'Equinoxe. L'Aiglon Furieux serait donc notre première cible. Je lançai un regard au Capitaine Taylor. Il me répondit d'un signe de tête.

- Branle-bas de combat ! Tous les hommes sur le pont ! Canonniers, à vos postes !

Le tambour des fusiliers marins, sur le pont, saisit son instrument et les baguettes de bois vinrent frapper la peau tendue de la caisse. On fit retentir la cloche du navire. Les hommes prenaient leurs postes, dégageaient les hamacs. Les canons étaient mis en batterie, les fusiliers s'armaient et se regroupaient sur le pont. Une agitation ordonnée régnait. Les hommes de l'Equinoxe savaient quoi faire, guidés par leurs quartiers-maîtres.

Je quittai néanmoins quelques instants la dunette tandis que partout on armait les canons, invoquant d'une part le prétexte de vérifier que la batterie inférieure avait bien reçu les ordres et d'autre part pour revêtir une tenue légèrement plus adéquate et surtout récupérer mon épée qui risquerait de se montrer fort utile au combat. Ainsi je revins au bout de quelques minutes, montant l'échelle du pont en coiffant mon tricorne tandis que la superbe lame à la poignée de bronze, non sculptée mais gravée de petites incisions, pendait fièrement à ma ceinture.

Dans l'intervalle nous nous étions rapproché de l'Aiglon Furieux, sans pour autant perdre de vue la corvette qu'il escortait, l'Empreinte de Sang. J'analysai la situation. Le petit navire continuait de filler à bâbord tandis que nous restions à bonne distance. Le vent qui n'était désormais plus d'arrière ne favorisait pas les capacités du brick, type de navire qui misait tout sur sa vitesse. Nous nous trouvions à peu près sur une ligne parallèle à celle de notre adversaire. Je me saisis du sextant posé sur la table de navigation. Hum… Angle d'environ vingt degrés, un demi-mille de largeur à l'œil nu entre les deux navires.

- Monsieur Allamy, d'après vos estimations, quel est le calibre des canons de ce navire ?

- Eh bien je dirais canons de huit livres, Monsieur.

A ce moment je me ruai vers la table de navigation. Je cherchai une feuille vierge, un compas, une règle, une plume et de l'encre. Je les trouvai en soulevant une pille de cartes de la côte. En l'espace de quelques minutes, je calculai et traçai mon plan d'attaque. Il suffisait de dévier un peu la trajectoire, se placer à portée de tir pour notre artillerie de 24 livres tout en restant hors d'atteinte de la canons de huit livres. Et si mes calculs se révélaient exacts, en vingt-et-une minutes nous pouvions rattraper l'Aigle Furieux : le brick se déplaçait à la vitesse de dix nœuds soit 330 yards par minute tandis que l'Equinoxe montait à quatorze nœuds, en somme 462 yards par minute. A l'aide d'un schéma je venais de prévoir les déplacements pour chaque minute. Le vent arrière nous poussait à vitesse maximale, les conditions étaient idéales. Avec de l'encre rouge, je fis figurer les lignes de portée : 200 yards pour les canons de l'Aigle Furieux, 600 yards pour ceux de l'Equinoxe.

Plan d'Edward:

Je m'empressai de présenter mon plan au capitaine Taylor qui l'examina d'un œil avisé, hochant la tête tandis que j'en expliquai la teneur.

- … Il nous suffit donc de dévier de vingt degrés à bâbord pendant trois minutes puis de redresse la trajectoire et rattraper l'Aigle Furieux. Au bout de vingt-et-une minutes, nous l'auront presque rattraper, seront à portée de tir et en deux salves bien tirées, nous pourrons les envoyer par le fond.

- Et s'ils tentent une manœuvre d'abordage pour nous contrer, ce serait suicidaire mais nous perdrions un temps précieux…

- Faisons placer des fusiliers dans les mats, ils abattront leurs officiers s'ils osent s'approcher à moins de cent yards.

- Soit. Dans ce cas faisons comme cela.

Je fis un signe de tête en approbation que me rendit le capitaine et aussitôt, je vins me placer près de Grumb qui tenait fermement la barre. Sur la table de la dunette, juste à côté, se trouvait le chronomètre dont je me saisis aussitôt.

- Monsieur Grumb, déviez à vingt degrés bâbord je vous prie. Pendant trois minutes.

Le maître pilote exécuta l'ordre sans attendre et vira légèrement de bord. Pendant ce temps, mes yeux restaient fixés sur le chronomètre dont je regardais les aiguilles tourner, seconde après seconde. Il arrivait qu'un instant mon regard se levât pour observer l'horizon, il revenait alors se poser le plus rapidement possible sur le cadran de l'engin. Lorsque les trois minutes étaient sur le point de se terminer, je lançai à Grumb :

- Préparez vous à virer à vingt degrés tribord… Maintenant. Voilà, maintenez le cap, ferme jusqu'à ce que nous rattrapions ce brick.

La trajectoire réglée, il ne restait plus qu'à parvenir à l'hauteur du petit bâtiment. Je rappelais pendant l'intervalle aux canonniers de se tenir prêts à bâbord et ordonnait à quelques fusiliers marins de monter dans les mats comme prévu pour descendre les officiers ennemis si l'Aigle Furieux daignait trop s'approcher. J'inspectai la bonne mise en œuvre des ordres. Le minutage s'avèrerait crucial, je le croyais, dans cette opération.

Dix-sept minutes plus tard, conformément à mes prévisions, nous nous trouvions quasiment face à face avec l'Aigle Furieux. Je regardai le Capitaine sur le visage duquel un sourire de satisfaction s'esquissait. Pareillement, je ne pouvais que constater la réussite de la manœuvre de poursuite. Mais le plus dur était à venir. Désormais il allait falloir veiller à rester à la hauteur du brick pour pouvoir le pilonner efficacement. J'ordonnai qu'on réduisît la voilure, pour éviter de dépasser le navire et de se lancer dans un contournement bien trop coûteux en temps. Et vint l'ordre le l'attaque.

- Bordée bâbord, à toutes les batteries, feu !

Les canons tonnèrent, leurs bouches s'enflammèrent et la blanche lueur du choc expulsa les boulets à une folle vitesse sur l'Aigle Furieux tandis que les volutes de fumée et de poudre s'échappaient des sabords pour remonter vers le haut du navire et se disperser laissant entrevoir l'adversaire touché et hélas pour lui dans l'incapacité de riposter. Sur le banc bâbord de la dunette, les enseignes étaient amassés et observaient l'ennemi. Allamy, lunette à la main contemplait minutieusement le spectacle. Tous les projectiles n'avaient pas atteint la cible, à cette distance cela relevait du miracle, mais le brick était affaibli et en fâcheuse posture et parvenait à avancer tant bien que mal.

J'indiquai à Grumb de continuer dans la lancée, même voile réduite tout en déviant très légèrement en direction du brick. Les canonniers avaient eu le temps de recharger et nous restions toujours bord à bord avec le brick. Une seconde fois, j'ordonnai de faire feu. De nouveau, les bouches crièrent, crachant ce qui serait pour ses pirates le feu de l'enfer.

J'éprouvais une immense satisfaction à l'idée de mettre à bas ce navire de pillards. Voilà la mer telle que je l'aimais, le vent en poupe, ces rafales qui parfois font s'envoler votre tricorne mais vous poussent sur les flots incessants. Lorsque les armes de la justice prononçaient le verdict final, alors la mer victime retrouvait sa dignité et avalait dans ses tréfonds les immondices qui l'avaient souillé du sang impur de l'acte barbare.

Une vaste explosion retentit et le feu se déchaina sur l'eau noire là où se tenait l'Aigle Furieux précédemment et une lourde et épaisse fumée sombre s'en dégagea. Je compris immédiatement que nous venions de toucher la réserve de poudre. Le premier tir avait du perforer la coque au niveau de la "sainte barbe" et le second, par hasard avait atterri à peu près au même endroit et sans obstacle majeur s'était surement engouffré dans la précédente brèche pour se jeter dans la réserve de munitions.

Les océans avaient prononcé leur châtiment.
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Butchlet

Butchlet

Matelot
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MessageSujet: L'affrontement [PV] L'affrontement [PV] Icon_minitimeDim 4 Déc - 23:21

Butchlet contemplait la colonne de fumée qui s’élevait de l’endroit où se tenait le brick quelques minutes plus tôt. Le frêle navire avait été littéralement écrasé sous l’artillerie portée par l’Equinoxe. La loi reprenait le dessus sur l’anarchie régnant sur ces mers. Des débris incandescents retombaient tout autour de l’épave. Le commandant de la frégate regardait froidement ce spectacle de désolation qui s’offrait à lui. La coque de l’Aiglon Furieux s’était pulvérisée en deux parties qui brûlaient tel un brasier satanique qui rappelait à Butchlet l’Inquisition qui avait fait son œuvre dans sa patrie lointaine : l’Empire. Les mâts s’étaient abattus dans l’eau tels des brindilles brisées par le souffle de l’explosion de la sainte-barbe. Les lambeaux de voiles qui restaient accrochés aux mâts achevaient de se consumer en flottant au vent. Au-dessus des flammes, le petit pavillon noir transpercé d’éclis continuait de flotter au vent, comme un dernier regain d’orgueil.

- Écouvillonnez ! Rechargez ! Paré à tirer !

Déjà les pièces de 24 livres et les caronades s’avançaient vers leur sabord, poussées par leurs servants. A six cents mètres devant se profilait la silhouette avancée de la corvette pirate. Sa coque rouge rubis et noir tranchait avec le bleu saphir de la mer Zannir. Rien qu’à la couleur, l’Empreinte du Sang impressionnait. A l’arrière, le grand pavillon pirate flottait avec arrogance comme pour narguer l’équipage de l’Equinoxe. Grumb continuait de faire avancer la frégate qui gagnait du terrain sur sa proie. Il n’était pas dit que cet équipage malfaisant échapperait à la force de la Justice. Butchlet appréhendait légèrement l’affrontement. La corvette semblait porter un beau nombre de pièces… Peut-être même plus que l’Equinoxe… Néanmoins, rien ne pouvait supplanter l’équilibre entre vitesse et armement de la frégate.

- Jolie manœuvre monsieur Longway, félicitations. A tout l’équipage ! Préparez-vous à vous battre du mieux que vous le pourrez !

Il était plus que satisfait par la destruction immédiate de l’Aiglon Furieux qui était parti orner les abysses. Le second de la frégate avait eu une idée intéressante qui s’était révélée parfaitement fructueuse. Il avait démontré qu’en dépit de son coup de sang de la dernière fois, il était un officier tout à fait capable. Restait à estimer le calibre de la corvette ennemie. Si elle portait un armement supérieur à celui de l’Equinoxe, il faudrait faire attention. Il fallait qu’il voie avec Grumb. Lui seul pourrait le renseigner.

- Monsieur Grumb ! Avez-vous idée du calibre qu’elle pourrait porter ?

Il désignait la corvette qui filait toutes voiles dehors.

Spoiler:

- Difficile à dire commandant… Nous verrons bien quand nous serons à portée de tir.

Il avait raison. Dès que les boulets commenceraient à pleuvoir, ils seraient fixés. Le calme revint subitement sur le pont. Il ne restait plus qu’à attendre. Dès qu’on serait bord à bord, ce serait la canonnade puis l’abordage, moment violent et barbare où le sang coulait littéralement à flots. Chacun se préparait à sa manière à l’instant fatidique. Butchlet donnait ses instructions. On faisait monter des boulets à chaînes pour déstabiliser le navire ennemi dès qu’il serait à portée de tir. Ainsi, on pourrait le bombarder sans risquer de se prendre un mauvais tir, voire l’aborder pour le capturer. C’est alors qu’un événement changea toute la donne. Une détonation sourde claqua dans l’air faisant se relever toutes les têtes. Une fumée blanche s’échappait déjà de l’arrière de la corvette. Le boulet passa en sifflant dans la mâture en trouant une voile qui laissa apparaître une grande déchirure circulaire.

- Nom d’un chien ! Comment peuvent-ils tirer à cette distance ?!

Le commandant eu pour toute réponse une deuxième explosion lointaine suivie d’un sinistre éclatement de bois à l’avant de son navire le faisant vibrer de part en part. Une gerbe d’éclis s’envola dans tous les sens fauchant plusieurs marins et fusiliers proches de la proue. A peine le calme revint que les gémissements des blessés se faisaient entendre tandis que des hommes se précipitaient vers eux pour les emmener dans les entrailles du navire où les attendait le chirurgien du bord… Rien de très réjouissant pour ces blessés qui préféraient souvent mourir plutôt que de se retrouver sous les lames du « boucher » du bord. La plupart survivrait… Mais à voir ceux dont les bras étaient en lambeaux, Butchlet imaginait sans peine, et avec tristesse, qu’il reverrait ces marins avec un bras en moins.

- C’est du 32 livres monsieurs ! Des couleuvrines !

Le plus gros calibre embarqué à ce jour sur un navire… La partie s’annonçait plus que serrée… Butchlet pointa sa lunette vers la corvette qui se trouvait parfaitement face à eux. Il distinguait des silhouettes sur la dunette du pirate, elles fixaient l’Equinoxe. Il se demandait qui pouvait commander ce navire de forbans. Il abaissa un peu sa lunette sur les quatre gueules noires des canons arrières. L’un d’entre eux tira et Butchlet baissa immédiatement sa lunette pour voir où tomberait le boulet. Ce dernier souleva une grande gerbe d’eau à dix mètres de la coque de la frégate. Un autre boulet s’enfonça dans un foc le déchirant en son milieu, le vent s’engouffrant dans le trou acheva de déchirer la pièce de toile. Un autre boulet tapa contre le bord et souleva un canon qui retomba sur ses servants dans une bouillie macabre et sanglante. Un autre boulet tapa au niveau de la ligne de flottaison. Les dégâts devenaient importants.

- Envoyez une équipe vérifier les dommages sous la coque ! Monsieur Grumb, sortez-nous de là ! Virez à tribord toute et revenez sur notre cap initial dès que nous ne serons plus sous le feu de leurs pièces arrière !

L’Equinoxe vira soudainement et commença à perdre de la vitesse tandis que les voiles faseyaient en faisant un boucan impossible. Grumb fit pivoter la roue dans le sens contraire à celui précédent et l’Equinoxe retrouva sa position initiale mais décalée de quelques dizaines de mètres qui la mettait à l’abri des couleuvrines de 32 de l’Empreinte du Sang. L’Equinoxe avait perdu en vitesse. Désormais, rattraper l’Empreinte du Sang ne serait pas simple. Butchlet fulminait. On avait osé tirer sur son navire sans aucun remord, sans aucun scrupule… On tirait sur un bâtiment militaire ! Il symbolisait l’autorité du royaume de Soakith dans ces eaux ! D’un point de vue strictement symbolique, la chose était forte. C’était une insulte directe à la souveraineté naturelle de la Marine Royale en mer Zannir. Quelle folie de faire cela…

- Pièce de chasse, parée ! Feu !

Une explosion claqua à l’avant de l’Equinoxe et de la fumée blanche s’échappa des deux sabords avant.. Le premier boulet tomba non loin de la corvette tandis que le second passa dans l’une des voiles qui se déchira sous la pression du vent. Une exclamation de joie retentit sur le pont de la frégate. L’Empreinte du Sang manifesta alors une attitude particulière qui attira immédiatement l’attention des officiers. Butchlet braqua sa lunette sur les huniers de la corvette. Ils étaient noirs de monde. Ça ne tenait pas debout. L’Equinoxe revenait sur la corvette. Les deux navires n’étaient qu’à 400m l’un de l’autre. Risquer autant de marins pour changer une voile ? Butchlet passa à la dunette ennemie. Le commandant pirate était drapé dans un grand manteau bordeaux et surveillait avec attention les marins dans les hauts sans se soucier du navire de guerre qui lui arrivait droit dessus. Soudain, les voiles inférieures de l’Empreinte du Sang se replièrent avec une rapidité incroyable tandis qu’elle virait plein tribord. Le commandant eu les yeux ronds en voyant le navire pirate pivoter sur lui-même pour présenter ses rangées de gueules noires à l’Equinoxe.

- Aux ââââârmes ! Virez plein bâbord monsieur Grumb !

La vitesse de la corvette cassée net, la distance entre les deux navires tomba à 100m tandis que la bordée ennemie se présentait aux trois-quarts avant tribord de l’Equinoxe. Et l’enfer se déchaina lorsque les pièces ennemies crachèrent leur feu en même temps dans un roulement d’explosion ininterrompu.

Le navire entier vibra sous les boulets s’enfonçant dans le bois de sa coque. Butchlet regardait avec impuissance les éclis de bois s’envoler de toutes parts transperçant les voiles. Plusieurs canons furent retournés tandis que leurs servants étaient réduits à l’état de charpie rouge non-identifiable. Un énorme craquement se fit entendre et le mât de hune bascula dans un bruit apocalyptique avant de s’arrêter au-dessus des flots avec un angle de 45°, retenu par les cordages qui étaient tendus au maximum. Le commandant de l’Equinoxe ne perdit pas son sang-froid et hurla ses nouveaux ordres tout en cherchant à distinguer la corvette dissimulée derrière un épais nuage de fumée.

- Monsieur Logway ! Rendez-moi compte des dégâts par monsieur Allamy puis montez tous les deux dans les hauts avec une équipe ! Coupez les cordages qui retiennent le mât avant que tout le reste ne suive ! Aux autres, feu à volonté !

La fin de sa phrase fut couverte par le fracas des pièces de 24 et des caronades qui répliquaient. Le pont fut bientôt noyé dans un épais nuage de fumée. Le pont tremblait sous les tirs tandis que le soleil perdait de son éclat dans la fumée qui masquait désormais la vue.

- Monsieur Grumb, on en profite ! Virez plein tribord, paré à tirer les autres !

La fumée commençait à se dissiper mais dans le lointain, le fracas des canons se fit de nouveau entendre et plusieurs boulets passèrent dans les hauts en sifflant. La corne du grand mât fut cassée net par la force invisible d’un boulet et tomba sur le pont dans un claquement sinistre. Butchlet ferma les yeux en sentant la coque trembler de nouveau sous les assauts répétés des projectiles de 32 livres.

A tribord, la corvette était remontée au vent et suivait désormais une route parallèle à celle de l'Equinoxe. La frégate laissa derrière elle la fumée des canons et Butchlet considéra les dégâts occasionnés par les tirs de ses hommes. Ils avaient fracassé l'arrière de l'Empreinte du Sang. La cabine arrière avait perdu ses vitres et de nombreux fragments de coque avaient été arrachés. La dunette avait également souffert mais le pirate au manteau bordeaux était toujours debout malgré le fait que son drapeau soit criblé d'impacts, preuve que les éclis avaient volé. Sur le pont de l'Equinoxe, le spectacle n'était guère réjouissant. Les blessés et les morts se confondaient et le bois du pont avait prit une teinte rouge où se mêlaient cadavres et débris organiques.

De nouveau, les explosions retentirent de part et d'autre. Plusieurs boulets frappèrent la coque de l'Equinoxe qui volait en morceau. Son bois léger n'était pas fait pour supporter de tels projectiles. Les craquement de la coque souffrante étaient de plus en plus importants.

- Commandant ! Brèche de la coque sur tribord avant ! Juste au dessus de la flottaison !

Le troisième lieutenant Janome, l'ai épouvanté par l'horreur du combat, arrivait essoufflé sur la dunette.

- Merci monsieur Janome, je prends en compte. Retournez à votre poste !

Les pièces de 24 de l'Equinoxe répliquèrent l'interdisant d'en dire plus. De nouveau, des lambeaux de fumée s'étirèrent le long de la coque meurtrie de la frégate impériale. Les coups firent mouche. Butchlet guettait une fenêtre d'action. A ce rythme là, ils seraient pulvérisés avant d'avoir pu réagir. L'Equinoxe avait perdu en vitesse et en maniabilité. Ses voiles inférieures étaient en lambeaux, son mât de hune pendait encore attaché aux cordages qui se rompaient un à un. Une dizaine d'hommes étaient dans les hauts qui vibraient à chaque coup reçu et ils coupaient tous les cordages qui retenaient la pièce du navire qui menaçait d'emmener dans sa chute toute la voile. Un boulet s'écrasa sur le pont, lacérant les lattes et faisant vibrer le grand mât et les voiles. Un hurlement fendit la rumeur de la bataille avant d'être rapidement effacé par le tir d'une caronade. Une silhouette s'écrasa sur le pont dans un craquement d'os glauque. Butchlet pria pour qu'il ne s'agisse pas de son second et se retourna pour considérer la corvette qui virait plein babord.

- Merde. Ils vont nous passer sur l'arrière, ils vont nous démolir ! A couvert tous ! A couvert ! Vous là-haut ! Descendez ! Vite ! Revenez sur le pont !

Tandis que tous refluaient vers l'avant du navire qui ne pouvait virer avec le mât de hune dans cette posture, Butchlet se retourna pour voir les huniers de la corvette passer derrière son frégate désemparée et ce fut de nouveau l'enfer. Le sol de la dunette se souleva et fut percé par des débris qui remontaient depuis la cabine du commandant. Les lanternes de la dunette furent pulvérisées dans un bruit de verre brisé tandis que les sculptures ornant l'arrière de l'Equinoxe étaient démembrées et défigurées. Le navire vibrait comme s'il passait sur un récif. Les mâts oscillaient tels des roseaux poussés sous le vent. Les derniers cordages retenant encore le mât de hune cédèrent en claquant tels les fouets des quartier-maîtres et le mât s’abattit dans l'eau dans un grincement atroce. Libre de ses cordages, la pièce de voile glissa le long du bord et dériva derrière le navire meurtri.

- Ils sont passés sur notre babord ! Feu à volonté !

Malgré les très sévères dommages occasionnés, la bordée de l'Equinoxe fut parfaite et alla s'écraser sur le tribord de l'Empreinte du Sang. Plusieurs canons furent retournés tandis que d'autres projectiles du bâtiment militaire pénétraient les entrailles de la corvette pirate. Butchlet imaginait sans peine les dommages causés à l'intérieur.

- Virez de bord, préparez-vous à aborder l'ennemi ! Monsieur Longway, préparez les hommes. Monsieur Grumb ! Virez de bord, babord toute !

- Impossible monsieur.

- Pardon ? Virez de bord, Grumb ! C'est un ordre !

- Nous ne pouvons pas virer de bord, commandant. Le gouvernail a été sévèrement endommagé par la bordée ennemie. Il faut le réparer.

Butchlet regardait la corvette s'éloigner en suivant la même route que lorsqu'elle avait croisé pour la dernière fois l'Equinoxe, lui décochant cette terrible bordée sur son arrière. Son commandant avait-il tout prévu depuis le début ? Butchlet s'approcha du bastingage pour regarder une dernière fois ce navire maudit qui s'éloignait avec vitesse vers le soleil couchant, meurtri par l'affrontement. Il se retourna pour considérer l'air fatigué de ses hommes, l'état de son navire. Le pont était encombré de cadavres, de blessés, de mourants, de membres, d'organes, de poulies, de canons, de cordages, de débris en tout genre... La dunette était dans un sale état. Le sol était percé en plusieurs endroits, la lisse avait été arrachée à plusieurs endroits et la poupe avait été totalement défoncée. Butchlet imagina sans peine ce qui devait rester de sa cabine. Pas grand chose sans doute. Ses affaires auraient sans doute été épargnées puisque transportées dans des coffres au fond du navire dès le début de la poursuite. A l'avant de la frégate, l'absence du mât de hune faisait un grand vide.

- C'est terminé donc. Bravo à tous, vous vous êtes comportés de la plus belle manière aujourd'hui. Monsieur Longway, veillez à réparer immédiatement le gouvernail et les dégâts les plus critiques. Pour les autres, double rations de rhum et de nourriture, ils l'ont mérité.
Monsieur Janome, mettez en panne. Nous allons profiter de cette nuit et cette mer d'huile pour réparer. Monsieur Grumb, nous mettrons cap sur Assecia aux premières lueurs de l'aube.
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L'affrontement [PV]

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